
« Canicules, vagues de froid, pluies torrentielles, sécheresses, cyclones, tempêtes et autres événements météorologiques extrêmes alimentent régulièrement l’actualité, notamment en raison de leurs impacts considérables sur les sociétés et l’environnement. La question du lien entre l’occurrence de tels événements et le changement climatique est légitimement posée aux scientifiques, et fait l’objet d’un travail croissant. La réponse n’est pas toujours triviale, d’autant que la médiatisation de plus en plus systématique de ces phénomènes et la vulnérabilité parfois accrue des populations à l’aléa météorologique peuvent donner une fausse impression sur les tendances climatiques. »
René Moreau, Vice Président de l’Association des Encyclopédies de l’Environnement et de l’Energie, Professeur émérite à Grenoble-INP, Laboratoire SIMaP (Science et Ingénierie des Matériaux et des Procédés), membre de l’Académie des sciences et de l’Académie des technologies.
Extrait d’un article publié récemment dans l’encyclopédie de l’environnement :https://www.encyclopedie-environnement.org
Comme chaque tempête violente, l’épisode caniculaire qui frappe la France en cette fin du mois de juin 2019 amène en effet nos concitoyens à s’interroger :
- Pourquoi le réchauffement climatique entraîne-t-il des événements extrêmes de plus en plus fréquents et de
plus en plus intenses ? - Quelle est l’empreinte de l’homme et peut-on la séparer des variations aléatoires naturelles ?
Les scientifiques, eux, observent, mesurent, modélisent et publient leurs résultats avec prudence, sans s’aventurer dans des conjectures infondées. Ainsi, au risque de décevoir le grand public, ils savent qu’il n’est pas possible de prédire de façon déterministe le temps qu’il fera dans une quinzaine de jours.
https://www.encyclopedie-environnement.org/air/introduction-a-prevision-meteorologique
Plus encore, ils savent pourquoi, et ils savent que, même avec des ordinateurs beaucoup plus puissants que les plus puissants disponibles aujourd’hui, cette prévision demeurera impossible.

Figure 1. Les moyens d’observation utilisés pour acquérir les données qui permettent de disposer, à un instant donné, d’un état initial de l’atmosphère, d’après https://www.encyclopedie-environnement.org/air/introduction-a-prevision-meteorologique/
Cette incertitude a deux causes principales. Tout d’abord, l’état de l’atmosphère à un instant donné ne peut pas être connu aux petites échelles : les satellites météorologiques ne voient pas les voitures démarrer, a fortiori ils ne voient pas les papillons voler. Or c’est à partir de cet instant initial supposé connu que les calculs prédisent le temps qu’il fera. Les erreurs inévitables sur ces petites échelles ont la fâcheuse propriété de contaminer progressivement des échelles de plus en plus grandes ; au bout d’une douzaine de jours l’atmosphère toute entière est contaminée. C’est ce que l’on appelle l’effet papillon.
La conséquence est claire : partant de deux situations initiales réputées identiques, si l’on introduit dans l’une d’elles une infime perturbation aléatoire, au bout d’une douzaine de jours les calculs peuvent conduire à des situations totalement différentes : un bel anticyclone sur la France pour l’une, une profonde dépression avec de fortes précipitations pour l’autre. Et pourtant les calculs sont justes.
Et le climat, est-il possible d’en prédire l’évolution ? Goose & Klein (https://www.encyclopedie-environnement.org/climat/variations-climatiques-dernier-millenaire/) remontent le temps sur deux millénaires et soulignent que l’accroissement de la température au cours des 150 dernières années est exceptionnellement rapide : environ 1°C par siècle (partie rouge de la courbe de la Figure 2), alors que le refroidissement antérieur était modéré, de l’ordre du demi degré par millénaire, et très progressif. L’épaisseur du trait gris est une indication de l’incertitude de ces valeurs prédites par divers modèles climatiques. On pourra noter qu’elle s’accroît avec le temps, tout en demeurant nettement inférieure à l’élévation de température au cours du dernier siècle.

Figures 2. Évolution de la température globale de la planète au cours des deux derniers millénaires d’après https://www.encyclopedie-environnement.org/climat/variations-climatiques-dernier-millenaire/
Le climat une machine extrêmement complexe dont Gerhard Krinner tente d’expliquer le fonctionnement (https://www.encyclopedie-environnement.org/climat/la-machine-climatique/).
Son article montre qu’il suit des variations prévisibles, comme l’alternance des saisons ou celle des glaciations et des rémissions interglaciaires, qui résultent de phénomènes naturels. Les durées prises en compte sont beaucoup plus longues que celles de la météorologie : au moins des décennies et non pas des semaines. Cet article montre aussi que l’influence de l’homme, producteur de dioxyde de carbone (CO2) et de méthane (CH4) qui contribuent beaucoup à l’effet de serre, est considérable et récente. Les experts du GIEC et la plupart des climatologues s’accordent à reconnaître que l’accroissement de la température globale de la Terre, au cours des dernières décennies, lui est imputable. Et l’Accord de Paris, signé en 2016, engage 196 États sur les 197 membres de l’ONU à mettre en œuvre des moyens visant à limiter ce réchauffement.