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Espèces Exotiques Envahissantes ou Espèces invasives

source: https://www.life-croaa.eu/les-especes-exotiques-envahissantes/

Définition

Aussi appelées EEEs pour Espèces Exotiques Envahissantes. Elles désignent toute espèce non-endémique, animale ou végétale, introduite volontairement ou involontairement dans un écosystème et qui altère la biodiversité et l’équilibre de cet espace.

L’introduction dans un milieu où l’espèce n’était pas originaire n’est pas rare et a toujours existé.

Les colonisations d’espèces représentent des phénomènes naturels mais qui sont éparses, ce ne sont pas des mouvements de masse. 

Elles peuvent être fortuites / involontaires, comme par exemple des graines accrochées sur les poils d’un animal, notre sac de randonnée… et ont de tous temps participé à la biodiversité mais sur de petites distances, les coquillages accrochés sur les coques des bateaux ou les insectes souvent retrouvés dans les soutes des avions parcourent eux des kms bien plus importants ! 

Mais à cela s’ajoutent les transferts d’espèces volontaires pour le commerce, les échanges…

L’homme est ici le principal responsable de ces mouvements de masse d’espèces exotiques. Et ce depuis toujours, particulièrement depuis les grands voyages maritimes et terrestres, avec la découverte des Amériques, le commerce via la route des épices… on a échangé de nombreuses espèces pour l’alimentation (notamment introduction en Europe de pommes de terre, de riz…). Mais ce phénomène s’est surtout aggravé ces 5 derniers siècles avec la révolution industrielle, et la mondialisation où les échanges et les importations se sont accélérés.

Vous savez peut-être que la majeure partie des légumes, fruits, des animaux d’élevage que nous connaissons aujourd’hui ne sont pas endémiques de la France (originaires): ils ont été importés à travers les siècles. C’est intéressant bien sûr ces brassages mais il faut être conscients qu’il ne s’agit pas de l’écosystème originel.

Comprendre l'impact des EEEs sur les écosystèmes

De toutes les espèces exotiques importées, beaucoup n’ont cependant pas réussi à s’établir dans ces conditions de vie différentes de celles qu’elles connaissaient, elles ne s’implantent donc pas. 

Cependant, lorsqu’elles arrivent à s’implanter dans un écosystème, elles vont poser des problèmes car elles n’y sont pas adaptés et viennent perturber l’équilibre naturel et fragile ! 

Les écologistes et biologistes parlent de la règle des 10% : sur 10% d’espèces qui s’établissent, 1% seront envahissantes. Cela peut sembler dérisoire mais pourtant cela représentent des milliers d’espèces et les dégâts peuvent être considérables ! En effet la base de données du programme européen DAISIE recense depuis 2005 plus de 12 100 espèces introduites volontairement ou non par l’homme en Europe. Parmi ces espèces, environ 1000 sont considérées comme envahissantes parce qu’on a pu remarquer et analyser les impacts négatifs sur la faune et flore locales. Souvent quand on prend conscience de ces impacts, il est déjà trop tard, l’espèce s’est trop répandue pour faire marche arrière et essayer de l’éradiquer.

Imaginons l’écosystème comme un système d’engrenage où tout fonctionne bien normalement. Si on vient y ajouter une nouvelle pièce, où apporter ne serait-ce qu’un grain de sable, le système va être perturber. Dans un écosystème, il n’y pas de niche écologique vide : une nouvelle espèce va donc forcément prendre la place – totalement ou partiellement – d’une autre espèce pour “restaurer l’engrenage”.

Les problèmes causés par ces EEEs

Une des 5 causes de perte de biodiversité

Les EEE représentent une cause majeure de l’érosion des écosystèmes dans certaines régions avant même celle de la dégradation des habitats naturels !  Ce fait résulte d’une évaluation et d’une estimation mondiale, selon les milieux et les méthodes de calcul l’ordre varie entre les 5 pressions qui ont été définies:

  • fragmentation et destruction des habitats
  • sur exploitation ressources
  • pollution eau air sol
  • changement climatique
  • espèces envahissantes

Les espèces introduites ne viennent souvent pas seules, mais, avec elles, sont introduits leurs parasites, leurs virus … (voir aussi notre article sur les pandémies, nouvelles émergences de maladies virales…).

Il y a donc une menace sur l’écosystème originel – souvent une modification de la chaîne alimentaire et des relations prédateurs/proies, et donc une altération de la biodiversité.

Pour mieux comprendre, prenons l’exemple d’une plante envahissante très bien implantée en France: l’ambroisie qui poussent notamment dans les champs cultivés de tournesol. Résultat: moins de tournesol > moins d’abeilles > moins de pollinisations d’autres plantes/arbres fruitiers >  pertes agricoles et pertes de biodiversité… > avec à terme souvent une disparition d’espèces locales. 

Les scientifiques ont démontré que les EEE sont responsables de 40% des extinctions d’espèces depuis les 400 dernières années (donnée CDB 2006 et UICN)! Selon les dernières estimations de la Liste rouge établie par l’UICN, les EEE constituent une menace pour environ 1/3 des espèces terrestres menacées et sont impliquées dans la moitié des extinctions connues. Il est plus difficile de chiffrer pour les espèces marines mais le combat est le même ! 

À cela s’ajoutent donc (comme on vient de le voir avec l’exemple de l’ambroisie) d’autres problématiques :

Problèmes économiques
La disparition de pollinisateurs entrainant perte de rendement dans les cultures. Une perte qui est aussi due à la croissance de plantes envahissantes. La perte économique à l’échelle mondiale due aux EEEs a été chiffrée à 5% de la production mondiale (Pimentel et al., 2002).

Problèmes sanitaires
Que ce soit pour l’homme (nouveaux virus, développement d’allergies à des plantes jusque là inconnues – de nouveau l’exemple de l’ambroisie, très allergisante) ou pour les animaux domestiques de l’homme (mort des chevaux ayant consommés cet ambroisie).

Que faire ? Comment lutter contre ces invasions biologiques ?

Politiques publiques, associations, organisations mondiales, nationales ou locales se mobilisent pour organiser la surveillance de ces EEEs, évaluer précisément leur répartition et leurs impacts, définir des stratégies et des actions de prévention sur le terrain. Mais les défis sont nombreux !

En France, c’est le Comité UICN qui s’implique sur cette thématique avec l’Office français de la biodiversité et le Centre de ressources Espèces Exotiques Envahissantes. Leurs principales activités :

  • Aider à la mise en place de stratégies d’action 
  • Promouvoir et diffuser les bonnes pratiques de gestion,  sensibiliser et informer
  • Affiner les connaissances

Mais tout citoyen peut aussi jouer un rôle à son échelle dans la prévention de ces invasions, par exemple :

  • Faire attention aux plantes des aquariums, ne pas les rejeter dans les rivières (voir l’égéria, plante aquatique utilisée pour oxygéner les aquariums) 
  • Il en est de même pour tout autre espèce exotique (écrevisse, crevettes, poissons…) : ne pas les relâcher dans la nature !
  • Bien nettoyer son matériel si l’on pratique une activité aquatique pour ne pas ramener avec soi plus loin des oeufs d’écrevisse, des algues…
  • Eliminer les EEE de ces jardins: ne pas planter de datura, renouée du Japon, ambroisie et participer à leur élimination (campagnes menées dans certaines villes), attention à ne pas les jeter au compost où leurs graines très resistances pourraient être de nouveau emmenées ailleurs et germer…

Anticiper les invasions ?

Il pourrait sembler plus opportun de s’attaquer au problème à l’origine et empêcher que ces espèces n’arrivent ? empêcher que l’invasion ne se répande et qu’il soit ensuite trop tard pour l’éradiquer ? Mais ce n’est pas si simple : comment détecter des débarquements fortuits d’espèces? comment les surveiller? comment mesurer précisément leur impact ?

Nuisance et/ou ressource ?

Dans la lutte contre les espèces invasives, il n’est cependant pas toujours facile de savoir quoi faire. Difficile de savoir si pour protéger la biodiversité à tout prix, il faut s’attaquer à une partie des espèces et donc par exemple éradiquer totalement cette EEE qui a été introduite. Prenons le cas par exemple des écureuils gris originaires d’Amérique et qui se sont massivement répandus en Europe. Beaucoup moins peureux que leurs cousins endémiques, ils se laissent facilement approchés des promeneurs. Ce sont des petits animaux que tout le monde trouve mignons. Faut-il les chasser car ils menacent sérieusement la survie des écureuils roux natifs ? La question est insoluble. Il n’y a pas de gentils et de méchants mais bien deux victimes ici, l’une souffre de la compétition et l’autre va devoir être chassée pour limiter l’extinction de l’autre…

On comprend donc que les échelles de valeur et les choix sont complexes…

Des initiatives de valorisation des plantes EEEs ont aussi été proposées dans certaines régions. Prenons l’exemple de la jacinthe d’eau pour qui ont a trouvé ces solutions d’utilisation:

  • Utilisation de ces fibres en vannerie, fabrication d’objets divers et notamment éponges anti-polluantes : elles peuvent en effet absorber 50 fois leur poids lorsqu’il s’agit de pétrole brut.
  • Production de biocarburant (biogaz et bioéthanol).
  • Fabrication de compost, d’ensilage pour le bétail et de complément alimentaire pour les humains.
  • Fabrication de géotextiles.

(sources Milieux Aquatiques, Service Publique)

Attention ici à ne pas transformer le problème en profit en oubliant l’origine de ce problème! En venir à cultiver par exemple massivement cette espèce dont on souhaitait au départ se débarrasser…

 

Quelques EEEs

Retrouves aussi nos articles sur des Espères Exotiques Envahissantes sur notre site, par exemple:


Sources :

  • Postcast « La Nature en enfer » de France Culture du 27/10/2020 avec Emmanuelle Sarat, (comité français de l’UICN, coordinatrice du Centre de ressources EEE), Franck Courchamp (écologue, Directeur au CNRS, au Laboratoire d’Écologie Systématique & Évolution de l’Université Paris-Sud, auteur notamment du livre « L’écologie pour les nuls » et la BD « La guerre des fourmis », paru aux éditions des Équateurs) et François Moutou (Dr vétérinaire, épidémiologiste et naturaliste, ancien directeur adjoint du laboratoire Santé animale de l’ANSES. Auteur notamment du livre « Des épidémies, des animaux et des hommes » paru aux éditions du Pommier.)
  • Données 2019 de l’UICN – Comité Français d’Union Internationale pour la conservation de la Nature)
  • Données du centre de ressources sur les EEE co-piloté par l’UICN et l’office français de la biodiversité)

Auteur : Nathalie Faggianelli.

Version : Novembre 2020

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