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Dégradation des écosystèmes et pandémies virales

par Nathalie Faggianelli

Tout d'abord qu'est-ce qu'une pandémie?

Endémie – Epidémie ou pandémie?

Pas toujours simple de saisir la nuance entre ces trois termes. La principale différence réside dans l’ampleur géographique d’une maladie.

Toutes les maladies ne vont pas causer une épidémie ou une pandémie, ce sont les maladies d’origine infectieuse*. C’est-à-dire, une maladie provoquée par l’entrée dans l’organisme d’un micro-organisme ou d’un agent infectieux qui peut être un virus, une bactérie, un parasite, un champignon, un protozoaire. Toutes les maladies infectieuses ne sont pas contagieuses, mais celles qui le sont vont donc se transmettre d’un individu à un autre et générer une épidémie/pandémie. Dans la nature, les maladies infectieuses peuvent se développer dans tout organisme vivant : aussi bien des animaux, des végétaux, des micro-organismes. Étonnant me diras-tu : un micro-organisme peut lui-même être infecté par un autre ? On connait notamment des « virus de virus ».

Nous reviendrons sur cela un peu plus loin 🙂

*NB : Les maladies génétiques – elles – sont héréditaires, c’est-à-dire qu’elles se transmettent à la descendance mais pas par contagion !

Une épidémie : le nom vient du latin epidemia qui signifie « à la maison », elle correspond au développement et à l’apparition intermittente (pendant une période donnée) et à la propagation rapide et d’une maladie contagieuse chez un grand nombre de personnes. L’épidémie se limite donc généralement à une région, un pays ou à une zone bien définie. 

Une pandémie : le nom vient du grec pan qui signifie « tout » et demos qui signifie « peuple ». C’est en quelque sorte une épidémie avec plusieurs foyers. La pandémie s’étend à toute la population d’un ou plus continents voire au monde entier. Son impact et sa gravité (nombre de personnes contaminées et taux de mortalité) sont donc plus importants que ceux d’une épidémie.

C’est le cas de ce dernier virus dont nous entendons tous parler : le SARS-COV2 plus connu sous son nom usuel de COVID19. La pandémie qu’il a générée, affectant donc tous les continents, et n’épargnant que très peu de pays, a contraint la plupart d’entre nous à rester confinés chez soi une longue période de temps.

Si l’épidémie régresse, ou au contraire si la maladie reste cantonnée à une région limitée, on parle alors d’endémie, soit parce qu’elle y reste en permanence, soit parce qu’elle y revient à différentes époques (le paludisme, par exemple, est une maladie endémique dans certaines régions du monde comme l’Afrique ou l’Asie du Sud. Elle est causée par la piqure d’un moustique qui transmet le parasite infectieux, le plasmodium).

virus pandémie

Cycles et émergence des pandémies

Les maladies infectieuses ont toujours existé, elles font partie de ce que les scientifiques appellent des « boucles de rétroaction » qui entretiennent un équilibre dynamique des écosystèmes, la plupart des pathogènes co-évoluant avec leur hôte depuis des millions d’années.

Leur mode de transmission est variable et dépend de leur réservoir (humain, animal, environnemental) et parfois de vecteurs (hôte porteur sain qui ne fait que transmettre la maladie sans être lui-même atteint).

Cette évolution et donc l’émergence virale est un phénomène naturel, dynamique, dû à la grande diversité génétique des pathogènes et notamment des virus.

Quelle est l’origine de cette diversité?

Cette diversité est permise par les « mutations génétiques« . Un chercheur de l’université de Paris Descartes, le Professeur Ivan Martic les décrit comme la « matière première de l’évolution » qui font que nous sommes aujourd’hui ce que nous sommes.

Pour aller plus loin, ce sont des modifications de l’ADN, l’acide désoxyribonucléique, le support de l’information génétique, le programme qui permet à nos cellules de fonctionner. Ces modifications sont naturelles, permanentes, héréditaires et rares arrivant aléatoirement. Ce sont des erreurs d’une ou plusieurs lettres de l’information génétique. Leur apparition spontanée en l’absence de facteurs mutagènes externes reste encore assez mystérieuse.

La plupart des mutations sont dites silencieuses, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas d’impact visible. D’autres peuvent être « nocives » voire létales pour l’organisme, mais elles peuvent aussi donner naissance à des avantages biologiques considérables, favorisant la survie de l’organisme qui les port, et elles auront donc plus de chance d’être transmises de générations en générations. Ceci explique que certains virus qui n’avaient au départ qu’un hôte animal puissent se transmettre à l’Homme : une mutation aléatoire est apparue, permettant au virus de passer la barrière d’espèce, de survivre et de se multiplier chez l’Homme.

L’émergence ou la ré-émergence d’un virus est donc un phénomène naturel mais aussi multifactoriel,  et il peut être favorisé aussi par la perturbation des écosystèmes.

 

La perturbation des écosystèmes favorise l’émergence des virus

L’émergence d’un virus peut être en effet la cause d’un bouleversement des niches écologiques des animaux hôtes, favorisant un contact entre des populations animales, humaines qui n’auraient pas dû se côtoyer normalement.

En modifiants les habitats, les interventions humaines entraînent des changements dans le nombre d’animaux de certaines espèces et dans leur réparation, créant aussi des habitats favorables à d’autres espèces. Lorsque des populations d’hôtes intermédiaires ou finaux des agents pathogènes/virus augmentent, les maladies associées vont alors augmenter.

Prenons le cas de la déforestation qui entraine des migrations de certaines espèces sauvages en quête de nourriture, ou encore une disparation de certaines, bouleversant du même coup la chaine alimentaire. Le nombre de cas de rage par exemple a augmenté massivement en Inde suite à la disparition de charognards, entrainant une accumulation de carcasses de bovins, et une augmentation de chiens errants rendus moins craintifs et qui sont vecteurs de la rage (fait reporté par Markandya et al. En 2008). Les ratio prédateurs/proies sont modifiés, entrainant une expansion importante d’une espèce par rapport à l’autre, espèce qui peut être un réservoir sain d’un virus dangereux pour l’homme – augmentant donc la force de l’infection.

La hausse des températures a également favorisé l’apparition de certaines espèces. On peut citer les moustiques Aedes aegypti et Aede albopictus (le fameux moustique tigre) qui ont migré vers les zones urbaines à des altitudes et latitudes plus élevées qu’auparavant, ce qui a conduit à l’émergence du virus Zika et du virus Chikungunya chez les humains. 

L’émergence virale est aussi dépendante des nouveaux comportements à l’échelle mondiale. Du fait de la mondialisation, les flux de personnes se sont accrus, facilités et accélérés, permettant alors une meilleure dissémination des virus, comme nous avons pu le voir avec ce virus SARS-COV2 ou COVID qui a touché si rapidement presque tous les pays du monde.

Les infections d’origine animale ont augmenté suite à l’intensification des élevages, la proximité des animaux et leurs conditions de vie. A cela s’ajoute l’industrialisation, la transformation alimentaire augmentant le risque de contamination des aliments par des agents pathogènes comme ceux à l’origine de la salmonellose.

La pression de l’Homme (pression anthropique) n’a cessé d’augmenter sur les écosystèmes, très peu d’espace sur terre sont encore vierges de toute intervention humaine. Cela entraîne des changements environnementaux importants et également l’émergence de nouvelles maladies zoonotiques (Jones et al., 2013).

 

Une vidéo qui explique très bien ces problématiques:

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